- AUGER (P. V.)
- AUGER (P. V.)UGER Pierre Victor (1899-1993)Fils d’un universitaire — son père, Victor Auger, était professeur de chimie à la Sorbonne —, le physicien Pierre Auger sut faire succéder à une brillante carrière de chercheur une intense activité de direction scientifique et administrative dont les fruits sont aujourd’hui internationalement reconnus.Après de brillantes études à l’École normale supérieure, il rejoint le laboratoire de Jean Perrin où il devient très vite un expérimentateur de grand talent dans le domaine encore neuf de la physique atomique. Avant même de finir sa thèse, il découvre l’effet qui portera son nom et dont l’application est maintenant courante.L’“effet Auger” est un processus d’auto-ionisation d’un atome déjà excité par un rayonnement. Dès 1923, Pierre Auger observe que, lorsqu’un gaz dans une chambre à brouillard absorbe des rayons X, plusieurs trajectoires d’électrons apparaissent, émergeant d’un même point. Qu’un électron très lié au noyau atomique soit expulsé par effet photoélectrique n’a rien d’étonnant. Mais l’apparition d’une autre trace signifie que le réarrangement des électrons restants (réarrangement habituel lorsqu’une couche électronique comporte une lacune) ne libère pas son énergie sous la forme d’un photon, mais plutôt sous la forme d’une énergie cinétique transmise à un électron alors expulsé du cortège atomique. Cette énergie cinétique, aisément mesurable, s’avère dépendre crucialement de la nature de l’atome concerné. De plus, la probabilité de ce processus est largement suffisante pour que son application à l’échelle industrielle soit réaliste. L’effet Auger est maintenant une méthode spectroscopique habituelle d’étude des surfaces des matériaux. On connaît l’importance de ces études dans toute l’industrie microélectronique.C’est l’époque (1937) où les physiciens se transforment en montagnards pour exposer leurs détecteurs au rayonnement cosmique, du haut du pic du Midi ou de la Jungfrau. Dans ses chambres à brouillard, Pierre Auger observe de très grandes gerbes de particules secondaires: ces “gerbes d’Auger” signalent l’existence d’un rayonnement extraordinairement énergétique (excédant parfois les 1 000 milliards d’électronvolts) venant du cosmos.Nommé professeur à la Sorbonne en 1937, Pierre Auger participe à la création du palais de la Découverte. Les années de guerre font alors évoluer sa carrière de grand chercheur à celle d’un grand organisateur scientifique. En 1941, il s’engage dans les Forces françaises libres, puis participe au Canada aux recherches anglo-franco-canadiennes sur l’énergie atomique. La Libération lui permettra d’exercer ses talents d’administrateur, d’abord dans la création des écoles nationales supérieures d’ingénieurs (E.N.S.I.), puis dans celle du Commissariat à l’énergie atomique (C.E.A.). Plus tard, il sera le premier président du Centre national d’études spatiales (C.N.E.S.) dont on connaît les succès.Sur le plan international, ses compétences s’exercent à l’U.N.E.S.C.O. où il dirige pendant plus de dix ans le département des sciences exactes et naturelles. Son œuvre de bâtisseur culmine peut-être avec son rôle déterminant dans la fondation du Centre européen de recherches nucléaires (C.E.R.N.) de Genève, dont la suprématie mondiale dans la physique de l’infiniment petit s’affirmera de plus en plus.Pierre Auger n’aura jamais cessé de s’interroger sur la connaissance scientifique, dont il craignait que “l’homme souvent ne se montre pas digne”, ni d’interpeller les responsables politiques: “gouverner, c’est prévoir, et la prévision de phénomènes à grande envergure, comme la désertification de l’Afrique ou la déforestation par pollution, devrait donner lieu à des efforts bien supérieurs à ceux qui sont consacrés à ces recherches et à ces réalisations”, écrivait-il en 1987 dans ses Dialogues avec moi-même .
Encyclopédie Universelle. 2012.